Concepteur d'image Calligraphie Malgré un intêret flagrant pour le narcissisme, l'artiste préfère ne pas étaler ici l'étendue sans horizons de sa culture et vous souhaite un bon diaporama. Merci pour lui

7.18.2012

Le dealer de dunes

Le dealer de dunes


6h du mat’. Nicotine en stick et mousse d’arabica au coin des lèvres. Je n’avais pas assez de cash, hier soir, pour payer le marchand de sable alors ma nuit a été blanche. Depuis qu’il ne prend plus les chèques et qu’on lui a piqué son terminal à CB, je suis obligé d’aller tous les jours au distributeur retirer le prix de mon sommeil. Hier était couvert de pluie alors j’ai eu la flemme. Il est passé sur les coups de 22h, je lui ai dis que je le paierais demain sans fautes, qu’il fallait absolument que je dorme. Le bougre n’a rien voulu savoir, la maison des rêves ne fait pas crédit.


J’ai bien essayé de compter les moutons et de les forcer à sauter par-dessus la barrière mais rien à faire. Mon imagination les transforme systématiquement en monstruosités, tout droit sorties d’un terrifiant bestiaire fantastique. Impossible de me concentrer si bien que la troisième bestiole refuse catégoriquement de franchir l’obstacle et discute avec les autres d’un pays imaginaire ou l’herbe ne meurt jamais. Et moi j’attends comme un con dans mon lit qu’elles finissent de papoter. 


Quelques gigots d’agneaux plus tard j’ai tenté le coup de la musique relaxante. Un bon trip hop calme et hypnotique. Les premières notes du CD étaient divines. Je commençais à m’enfoncer dans le matelas et à sentir mon corps s’envoler, un peu plus haut à chaque note. Le timbre angélique de Beth Gibbons posé comme un murmure pour me souhaite bonne nuit. Une coupure de courant inopinée a stoppé net mon envol, à deux ronflements de la porte des rêves. J’ai maudis EDF, les empêcheurs de dormir en félicité. Je ne voulais pas d’une somnolence, j’avais totalement besoin de plonger au plus profond de mon oreiller. Rêve ou cauchemar je m’en foutais, pourvu que ça soit autre chose que cette réalité.


J’ai pensé au mini bar. Aucun éveil ne résiste aux vapeurs éthyliques. Une bonne cuite et au lit c’est aussi efficace que le plus valeureux des somnifères. J’ai ouvert les portes de ma brasserie personnelle pour constater le désert de dégobi. Où plutôt une belle collection de bouteille, vidées par mes potes la semaine passée, autour d’un poker. Paul avait d’ailleurs dégobillé copieusement, et pas que du sable. J’avais fais tapis avec une paire de deux, faisant flirter mes chances de succès avec le néant. Tout le monde à suivi. Le croupier à sorti deux autres deux du jeu, mon sourire sentait bon la victoire. Enfin bref, prit de contrariété dans sa condition de mauvais perdant, Paul a passé le reste de la soirée aux toilettes. 


Me rappeler de tout ça ne me donnait absolument pas envie de dormir. L’électricité n’étant pas rétablie, impossible de végéter devant les soporifiques programmes de la nuit à la télé. J’ai fais quelques mots croisés à la bougie. Divinité des rêves prophétiques, fils de Nix et d’Hypnos en sept lettres. MORPHEE. Et s’il pouvait venir me chercher là, tout de suite, ça serait une bonne chose.


Le systématique-tac de la pendule me rapprochait des premiers rayons de soleil. Je n’avais toujours pas sommeil. De toute façon la nuit était derrière moi maintenant et elle ne m’avait pas fait des choses très catholiques. J’aurais préféré qu’on s’entrelace sensuellement, qu’elle me couvre de baisers, m’enduise le corps d’onguents relaxants. Elle a préféré me prendre en traître, dans ce que je considérais comme un viol de mon droit au repos. 


Mon réveil a sonné pour enfoncer le clou. S’il avait eu une langue et un minimum de cervelle avec il m’aurait sûrement dit :
- « Debout la dedans, finit la douce nuit !!! Ahhh mais t’es pas là ? T’as pas réussi à t’endormir, comme c’est dommage. Laisse moi sourire devant la tête de zombi que tu vas traîner toute la journée au boulot »
Mon réveil est un enfoiré…


6h du mat’. Cancerette en barre et crème de caféine au coin des lèvres. J’ai prévu d’acheter un flingue, aujourd’hui, pour discuter poliment avec le marchand de sable.